Mondialités
création 2024
Musique - théâtre - vidéos
Par un travail sur la localité, dans l’Aude, où siège la Compagnie 3x2+1 | Antoinette, les artistes de la création « Mondialités » s’attachent à lier créolisation et conscience sociale et écologique. Cette approche permet de tisser des liens entre local et global.
La fragilité de l’écosystème local est directement liée aux irresponsabilités d’initiatives humaines (industrielles, agricoles, commerciales...) et touche tous les éléments de notre environnement : eau, air, terre, mer.
Trois sujets d’ordre social et environnemental portent les premières réflexions de la création « Mondialités » :
. Symbolisée par les problèmes écologiques liés à l’exploitation de la mine d’or de Salsigne et ses conséquences polluantes depuis des siècles d’exploitation, le réchauffement climatique amplifie les dégradations sur notre écosystème local, tels l’Orbieu et le Trappel, cours d’eau saturés d’agents polluants.
. La pollution des nappes phréatiques à Carcassonne, chez deux des artistes de la création « Mondialités », rendant l’eau impropre à la consommation, met en avant la responsabilité de l’agriculture intensive dans nos campagnes.
. La construction d’un énième nouvel espace commercial en périphérie de la ville de Carcassonne a dévasté l’écosystème et nous met face à l’incohérence des choix de notre société consumériste.
Le regard sur notre localité est une prise de conscience nécessaire et du pas de côté permettant un regard différent sur notre société mondialisée.
Les prises de conscience citoyennes et institutionnelles face à ces catastrophes passées ou à venir avancent lentement, la résistance sous toutes ses formes à ces initiatives est indispensable.
L’approche artistique et sensible est une des formes nécessaires à la prise de conscience des dommages sociaux et environnementaux pour entrevoir un Tout Monde nécessaire aux changements incontournables de notre société. La démarche artistique portée par notre création 2024 permet de concrétiser la pensée archipélique d’Edouard Glissant, dans une création sous forme d’un opéra actuel, liant musique, textes poétique, témoignages d’habitants et projections visuelles.
A noter la présence d’Aliocha Wald Lasowski, philosophe, écrivain et universitaire spécialiste de l’oeuvre d’Edouard Glissant. Aliocha interviendra dans l’élaboration de la création, et en tant que spécialiste de la pensée d’Edouard Glissant, collaborera sur le contenu philosophique de « Mondialités ».
Distribution
. Antoinette :
Julie Audouin flûtes, voix, loops
Arnaud Rouanet saxophone ténor, clarinettes, percussions, voix
Tony Leite guitares, loops, voix
Laurent Soffiati comédien, mise en scène
Jean-Louis Dubois Chabert écrivain et création vidéo
David Ona création et diffusion sonore
Aliocha Wald Lasowski philosophe – regard extérieur et aide à l’écriture

Aliocha Wald Lasowski - Philosophe
« Le philosophe Edouard Glissant nous conduit à changer le regard, à « penser en termes archipéliques » en portant attention aux singularités de la planète. Avec lui, l’urgence écologique s’inscrit dans la prise de conscience de la diversité des relations, au cœur de ce qu’il appelle le Tout-monde – un monde où les êtres humains, les animaux et les paysages, les cultures et les spiritualités sont en connexion mutuelle. Sensible aux lieux fragiles, qu’il faut protéger, sa pensée des archipels aborde le monde par la mosaïque de relais, opposée à la vision d’un bloc totalisé, continentalisé, monolithique.
Si la « mondialisation est l’uniformisation par le bas, le règne des multinationales, la standardisation, l’ultralibéralisme sauvage », explique Glissant, elle « est aussi le revers négatif d’une réalité prodigieuse que j’appelle Mondialité, un monde qui pour la première fois et de manière immédiate se conçoit à la fois un et multiple ». La mondialité bouleverse nos attaches et nos appartenances. Contre le repli sur soi du particularisme, elle envisage les points du monde en échos, dans l’élan et le mouvement qui les fait vivre ensemble.
Pour empêcher l’extinction de la biodiversité et protéger les espèces minérales, végétales et animales en danger, la mondialité offre une nouvelle synergie, un opérateur pluriel qui bouleverse la représentation des causalités classiques : la relation archipélique. A l’écoute de la diversité, la relation archipélique des lieux est géographique et spatiale, autant qu’imaginaire et culturelle.
Si la multiplicité des réseaux fonde la richesse de la relation archipélique, elle permet aussi ce que Glissant nomme la « créolisation » : en un lieu donné, la mise en contact des cultures donne un résultat « imprévisible » porteur d’un sens nouveau. « La créolisation n’est pas une simple mécanique du métissage, c’est le métissage qui produit de l’inattendu. » Au cœur du Tout-monde, la créolisation milite pour le vivant et sa diversité.
Pour l’ancien directeur du « Courrier de l’Unesco », le Tout-monde n’est pas seulement la planète telle qu’elle est aujourd’hui, c’est aussi sa projection, son futur, son devenir. Rêver le monde, en s’appuyant sur nos utopies, permettra de le sauver. La protection de la terre ne repose pas uniquement sur la connaissance des moyens et effets, cela suppose aussi un imaginaire. Si nous envisageons uniquement la terre comme objet de maîtrise technique, nous nous condamnons nous-mêmes.
De là, réinventer de nouvelles articulations et fonder une attitude écologique forte : par les imaginaires du Tout-monde, chaque citoyen participe à une transformation par archipélisation, engage un processus innovant du bâtir-ensemble et de la démocratie-archipel, dans un jeu d’interdépendance et de rééquilibrage des espaces connectés. Avec le projet d’un monde-en-archipels, la mondialité est aujourd’hui l’une des faces d’une nouvelle écologie. »